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ENSEIGNEMENT 2 : La symbolique du numérique dans le secteur ESS

Par Alisea Dumery | 29 février 2024

La thématique de la symbolique dans le secteur de l’ESS n’est pas naturellement mise en rapport avec les usages et le matériels numériques au sein des structures. Cette thématique n’était à l’origine pas visée par notre projet. En effet, nous n’avions pas identifié que le matériel numérique ainsi que les usages numériques au sein des structures que nous allions observer allait être un enjeu symbolique et de distinction entre les salariés d’une même structure.

Les symboles sont des éléments représentatifs qui évoquent une idée ou un concept au-delà de sa forme concrète. De nombreux objets du quotidien possèdent une telle portée, partagée collectivement ou personnellement. On retrouve ces objets dans notre vie personnelle mais aussi dans notre vie professionnelle. 

Or, si les outils numériques ont progressivement intégré les milieux professionnels, leur diffusion fait également l’objet de discussions et parfois de frustration au sein des organisations.

Une hiérarchie tacite entre sachants et non-sachants

Si à priori leur distribution se fait en fonction des compétences et des rôles établis, elle reflète alors la hiérarchie établie entre les sachants et les non sachants. En effet, à quoi bon donner un ordinateur portable à quelqu’un qui ne sait pas s’en servir ? Pourquoi renouveler le matériel informatique d’une personne qui ne s’en sert pas bien ?

Sans que ces questions ne ressortent directement dans la plupart des observations que nous avons réalisées, la distribution du matériel informatique au sein des organisations de l’ESS ayant intégré notre protocole n’est jamais claire et lisible. Aurélie Dudézert, Nathalie Mitev et Ewan Oiry dans l’article « Numérique et symbolique » affirment que « Cette dimension symbolique associée aux TI en fait un vecteur puissant de construction du sens pour les acteurs en particulier dans leurs pratiques de travail ». 

De fait, ne pas distribuer tel ou tel outil numérique à un salarié contribue à son sentiment de non-sachant et à la crainte associée à son usage futur. Au-delà de cet aspect, cette absence d’équité a comme enjeu la reconnaissance et la valorisation des individus au sein des organisations.

L’inégalité dans la répartition des ressources

On peut également élargir le champ des outils numériques aux logiciels et aux formations, qui restent à la fois une énigme pour le salarié de l’ESS. Cette inégalité dans la répartition des outils, des formations et des logiciels numériques n’est pas que du fait de la direction. En effet, les salariés eux-mêmes contribuent à cette hiérarchie numérique en identifiant au sein des équipes des personnes qui seront en charge de l’usage du numérique pour le groupe. Or l’absence de formalisation peut entraîner des tensions au sein des équipes.

Comment s’incarne alors concrètement cette iniquité dans la répartition du matériel ? À la fois par la distribution par exemple de téléphones professionnels au sein de certaines structures pour des fonctions identifiées comme les chefs d’équipe par exemple, mais aussi par le renouvellement régulier de certains ordinateurs pour certains postes (dans le secteur de la communication par exemple).

Pour conclure, cette iniquité dans la répartition du matériel numérique au sein des structures de l’ESS contribue au sentiment que le numérique n’est pas un outil neutre, qu’il est vecteur de symboles forts. Or, cette représentation des outils numériques, des logiciels et des formations constituent un frein dans l’appropriation large des nouvelles technologies et invitent à des pratiques informelles du numérique non répertoriées au sein des organisations.